mardi 13 juin 2017

Le regard de Dieu

Un regard essentiel à acquérir, est celui du Seigneur. Bien sûr, il ne s'agit pas de vivre dans l'illusion que nous pourrions réellement voir comme Dieu voit. Mais certaines petites comparaisons peuvent être essentielles pour poser un regard plus juste et plus aimant sur nos vies.

Pour comprendre certains aspects du regard que Dieu pose sur nous, il nous suffit d'envisager le regard d'un père aimant sur son enfant. Que sait le père sur son enfant? Qu'il est faillible, et que c'est normal: qui trouve ridicule de voir un jeune enfant tomber quand il apprend à marcher? Rien que de très normal en somme. Ainsi en est-il de tout un chacun au long de sa vie spirituelle: nous apprenons à suivre les pas du Christ et nous sommes balbutiants. Nous tombons. Nous avons honte de témoigner, nous ne savons pas bien aimer nos frères ou le Seigneur... eh bien, oui: nous sommes des enfants. Nous sommes tombés, nous tombons et nous tomberons. Nous savons que le Seigneur nous relèvera toujours et qu'Il veille.

Ce même regard, nous pouvons le poser sur ceux que nous approchons: nous rappeler qu'ils sont des enfants aimés de Dieu, qu'ils cheminent, tout comme nous, et qu'ils tombent, également. Peut-être pas aux mêmes endroits que nous, voilà tout. Mais nous n'avons pas tous les mêmes aptitudes.

Ce changement de point de vue peut nous aider à faire disparaître certaines de nos duretés de cœur, envers nous comme envers les autres. Car la croissance dans la vie spirituelle passe par cette transformation de notre regard en un regard miséricordieux, aimant, simple, joyeux, attentif, intelligent, patient.

Lorsque nous péchons plus gravement, que nous suivons plus ou moins volontairement un chemin qui nous écarte loin du Seigneur, à nouveau, la comparaison est évidente - elle est même présente explicitement dans l'évangile: le Seigneur se réjouit de nous voir revenir vers lui et guette notre retour anxieusement, comme ferait n'importe quel père aimant brouillé avec son fils. Il ne faut pas s'arrêter à nos inquiétudes, à nos hontes: elles sont le fruit du péché en nous. Car «la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant» (st Irénée de Lyon). Quel père digne de ce nom s'arrêterait au retour de son fils qu'il croyait mort? Auriez-vous cette dureté? Quand bien même nous l'aurions, Dieu, lui, ne l'aurait pas («Si mon père et ma mère m'abandonnent, Yahvé m'accueillera.» Ps 27,10 «Une femme oublie-t-elle son petit enfant, est-elle sans pitié pour le fils de ses entrailles? Même si les femmes oubliaient, moi, je ne t'oublierais pas.» Is 49,15).

Enfin, l'on sait que nous ne sommes pas tous libres de la même liberté. Certains d'entre nous souffrent d'une liberté amoindrie, handicapés qu'ils sont par la vie -- ayant été victimes de traitements durs, souffrant de handicaps ou de maladies diverses -- et certains souffrent même d'une inclinaison à de terribles désordres. Ceux-là sont parfois victimes d'une hostilité généralisée, à cause de crimes qu'ils ont pu commettre ou, plus couramment, à cause de leur bizarrerie. Sur eux également, il faut apprendre à poser le regard du père aimant sur son enfant blessé. Et au plan spirituel, nous souffrons tous du handicap terrible qu'est le péché et lorsque l'un de nous s'y adonne, nous devrions bien plus le plaindre, prier pour lui, que le condamner. Car lorsque Dieu nous voit pécher, il nous offre son salut. Lorsqu'un enfant quitte le droit chemin, son père est là pour l'aider dès qu'il voudra y revenir et n'est certainement pas dans la redoutable attitude qui consiste à réduire la personne à ses actes. «Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ; remettez, et il vous sera remis.» Lc 6, 37 (on lira avantageusement ce beau texte de Taizé). En passant, on note que "ne jugez pas" ne possède pas de complément d'objet, détail grammatical essentiel pour notre vie: nous ne devons juger ni les autres, ni nous-même... ni Dieu.

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