mardi 13 juin 2017

Combat spirituel

La vie spirituelle est le lieu d'un combat entre la vie et la mort, selon ce que le Seigneur nous dit: «J'ai mis devant toi la vie et la mort, choisis la vie afin que tu vives !» Dt 30, 19.
Mais faire le choix de la vie n'est pas simple, car les sources de mort peuvent être attirantes et les lieux de vie, fort peu séduisants à première vue.

La vie humaine ne se déploie que dans un mouvement: l'amour, l'amour de Dieu en nous, et elle est contrariée avant tout par le péché, spécialement notre orgueil et notre égoïsme. L'un et l'autre se combattent, donc, avec des moyens dont tout un chacun peut s'emparer si vraiment l'on veut choisir la vie, en un chemin où moyen et fin se confondent et ne doivent pour autant pas être pris l'un pour l'autre.

Le premier moyen est le but: l'adoration et la louange de Dieu, tout particulièrement dans l'eucharistie, où nous nous exposons avant tout à la source de la vie, de tout bien et de tout amour, nous laissant progressivement purifier de notre péché pour grandir dans la sainteté, pour vivre de la vie même de Dieu. Dans ce lieu, nous sommes toute passivité, oubli de nous même, rendant à Dieu ce qui lui appartient et manifestant notre amour pour Lui.

Un autre moyen essentiel est à nouveau un but: le service des autres et de prier pour eux - à vrai dire, quel autre moyen d'aimer... que d'aimer? Et l'on ne peut aimer Dieu sans aimer son frère (1Jn 4, 20). Notre amour de nos frères et sœurs doit procéder de notre amour de Dieu, et donc de notre foi et de notre espérance: notre foi qui nous enseigne que tout homme a été sauvé par le Christ, notre espérance qui appelle tout un chacun à vivre dans l'amour de Dieu pour l'éternité.

Dans la prière d'action de grâce pour le bien que nous recevons et dans l'union à Dieu lorsque la croix passe dans notre vie, grande ou petite, lieu d'expression et de croissance dans l'amour totale, celui que le Christ nous a montré.

En demandant au Seigneur la force de grandir pour mieux aimer et servir, pour nous purifier de nos replis sur nous-mêmes, de nos superficialités qui nous font mal comprendre les autres ou douter de Dieu lui-même. En apprenant donc à nous regarder en vérité, sans nous juger, mais en sachant voir nos mouvements de repli, d'oubli du Seigneur et des autres. Un moyen tout simple peut être de regarder ces défauts des autres qui nous exaspèrent et essayer d'en repérer les germes en nous, plutôt que d'en faire une occasion de condamnation de notre prochain.

En vivant nos échecs spirituels dans la miséricorde infinie de Dieu et dans l'espérance: de tout, le Seigneur peut tirer un bien plus grand encore et nos fautes peuvent nous faire grandir dans l'humilité, l'abandon au Seigneur, la compréhension de nos frères. Il ne nous appartient que de ne pas baisser les bras. Et le sacrement si essentiel de la réconciliation, source de force intérieure, de joie de paix et d'amour du Seigneur.

En nous nourrissant dans la prière d'oraison et de demande.

En cultivant les vertus, pour former notre volonté. Les vertus auxquelles il faut s'entraîner, sans considérer pour autant que nous sommes la source de la vie, mais que par notre consentement libre à lutter contre la mort et à faire grandir la vie dans les petits détails du quotidien ou de plus graves composantes de notre existence, nous puissions laisser le Seigneur faire son œuvre en nous. Et donc sans juger nos résultats - ils ne nous appartiennent pas - mais en restant simplement dans l'effort, confiants que tout ce qui est vécu par Lui, avec Lui et en Lui portera du fruit. Il en va ici comme du sport: les premiers efforts sont les plus difficiles lorsque le vrai entrainement commence et l'on ne peut grandir sans claire vision du but: aimer Dieu, les autres et nous même. En gardant bien présent à l'esprit que nos chutes sont des occasions de progrès immense si nous nous rapprochons du Seigneur.
Il est important de comprendre que désespérer de nos chutes montre que nous vivons dans un orgueil mortifère, égocentrisme subtil qui nous pousse à croire que nous sommes la source de notre sainteté, de nos progrès. Mais Dieu seul est Saint et c'est Lui qui nous donne la sainteté, que nous pouvons accueillir ou refuser. Nous, nous devons chercher à nous unir à la volonté de Dieu jusqu'au plus intime de nous-même, de nos désirs, apprendre à nous réjouir de sa présence, comme on se réjouit de la présence de l'être aimé, indépendamment de nos supposées imperfections.
Car voir nos imperfections et s'en attrister, c'est les tenir pour plus importantes que Dieu Lui-même, plus importantes que sa présence aimante et vivifiante. En revanche, il faut savoir reconnaître dans ces mouvements intérieurs l'occasion d'une prise de conscience de zones de notre être à purifier, zones progressivement mises à jour au fil de notre vie et des expériences que nous traversons, zones à convertir à l'amour de Dieu, des autres et de nous-même. Il n'y a pas à se désoler de telle ou telle rétractation, il faut la remettre au Seigneur et la combattre quand elle se représente.
Pour cet entraînement, il faut un plan de vie auquel nous tenir pour ne pas perdre le chemin, un plan fait de choses simples, claires et vérifiables qui multiplie quotidiennement les rencontres avec celui que nous cherchons à aimer toujours plus et -- pourquoi pas ? -- un coach, c'est-à-dire un père spirituel...

En nous formant spirituellement. Il s'agit de profiter de l'expérience de ceux qui nous précèdent dans la foi, il s'agit de nourrir notre intelligence et nous encourager sur le chemin. Nourrir l'intelligence de notre foi afin de mieux connaître le Seigneur, les autres et nous même, pour mieux aimer -- car peut-on aimer ce que l'on ne connaît pas? Être encouragé sur le chemin par celui que d'autres ont suivi, où nous les voyons lutter, tomber, se relever, s'interroger... tout comme nous.

Comprendre, enfin, que l'amour est un mouvement unique. Aimer Dieu, ses frères et soi-même procède de l'amour de Dieu en nous. S'il est un seul des trois que nous n'aimons pas, l'amour n'est pas en nous. Et ce n'est pas une catastrophe, c'est une réalité toute humaine qui appelle de notre part ouverture à l'action sanctifiante du Seigneur pour apprendre à voir le monde comme Il le voit, l'aimer comme Il l'aime, jusqu'à notre petite personne.Le christianisme n'est pas introspection solitaire, il est dialogue intérieur. Si, lorsque nous nous regardons nous le faisons sans le Seigneur, nous sommes dans l'égocentrisme et l'orgueil. Nous sommes en grand danger de ne pas nous aimer et d'oublier l'appel du Seigneur à la vie, qui ne veut qu'une chose: que nous vivions dans l' union d'amour avec Lui. Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu...

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