mardi 1 août 2017

Zététique et religion

La vidéo située ici, assez typique du genre d'oppositions que l'on entend couramment sur la question de la science et de la croyance, appelle, à mon sens, quelques observations, proposées dans ce document. Forcément, il ne s'agit pas d'un propos général sur la question mais d'une réaction circonstanciée et personnelle... Mais en est-il d'autres ?

lundi 17 juillet 2017

La violence dans la bible

Cette - apparemment - redoutable question a en fait reçu des réponses dès les débuts du christianisme. Robert Barron nous les retrace rapidement.

dimanche 9 juillet 2017

Eucharisite : la quatrième coupe.

Notes d'une remarquable conférence de Scott Hahn sur l'eucharistie. Elle a été donnée aux États-Unis et l'avant dernière section est placée dans ce contexte, mais le lecteur n'aura pas de mal à la transposer dans le sien ;-).

mardi 13 juin 2017

Souffrir avec le Christ

Citations extraites de ce site.

1-ACCEPTER SA SOUFFRANCE

1)-Ce n’est pas le fait d’esquiver la souffrance, de fuir devant la douleur, qui guérit l’homme, mais la capacité d’accepter les tribulations et de mûrir par elles, d’y trouver un sens par l’union au Christ, qui a souffert avec un amour infini (Pape Benoît XVI).
2)-L’acceptation de la souffrance est peut-être la plus grande grâce qu’un homme puisse recevoir ici-bas (P. Slavko Barbaric).
3)-C’est l’acceptation qui nous délivre (Ste Élisabeth de la Trinité).
 4)-Dieu ne nous laisse pas libre de souffrir ou de ne pas souffrir; il nous laisse seulement l’ultime liberté d’accepter avec amour ou avec amertume (Jacqueline Montvic).
5)-Si l’on savait quelle récompense attend au ciel la moindre souffrance bien supportée, on demanderait à genoux de souffrir (St frère André).

2-LES BIENFAITS DE LA SOUFFRANCE

1)-La Croix est comme le toucher de l’amour éternel sur les blessures les plus douloureuses de l’existence terrestre de l’homme (St Jean-Paul II).
2)-Nous ne voulons pas admettre que la souffrance est nécessaire à notre âme; que la croix doit être notre pain quotidien. La croix est nécessaire à l’âme comme la nourriture au corps jour après jour; c’est elle qui la purifie et la libère de son attachement aux créatures. Nous avons du mal à comprendre que Dieu ne veut pas, ne peut pas nous sauver sans la croix; et plus il attire une âme à lui, plus il la purifie par la croix (Padre Pio).
3)-Le médecin nous donne le médicament pour guérir notre corps blessé; Jésus nous donne la souffrance qui est le médicament pour guérir et transformer l’âme blessée, pour nous rendre plus patients et plus charitables (Gisela Barreto).
4)-Dieu nous forme par la souffrance à quelque chose qui nous dépasse, c’est quand on ne peut plus rien faire que l’on peut commencer à adorer Dieu (Julien Green).
5)-La souffrance crée en nous des merveilles de cœur qui n’aurait jamais existé sans elle (Léon Bloy).
6)-La Croix peut remplacer tout, et rien ne peut la remplacer (Ste Bernadette Soubirous).
7)-Ceux qui sont guéris vite sont ceux qui n’ont pas la foi, ou qui ont peu de foi, afin qu’ils aient la foi. Ceux qui ont déjà la foi solide ne sont pas guéris vite, parce que le bon Dieu préfère les éprouver, les faire souffrir, pour les sanctifier davantage (St frère André).
8)-Lorsque le Seigneur veut se servir de quelqu’un, il commence souvent par le réduire à zéro (Marthe Robin).
9)-La douleur est une plaie par où l’homme se vide de la terre pour faire entrer en lui le ciel… ou l’enfer (Gustave Thibon)
10)-S’il n’y avait pas la souffrance comme témoin, on ne saurait pas si on aime (André Frossard).

 3-COMMENT PORTER SA CROIX 

1)-Comme ceux qui marchent sur une corde tiennent toujours dans leurs mains le bâton de contrepoids pour balancer leur corps également, dans la variété des mouvements qu’ils ont à faire sur un si dangereux plancher, vous devez aussi fermement tenir la sainte croix de Notre Seigneur (St François de Sales).

2)-Par le moyen des difficultés, les âmes se fortifient sur le chemin du ciel. Il ne faut pas se laisser couler au fond des difficultés, mais nous appuyer sur elles pour aimer davantage… comme le petit canard s’appuie sur l’eau pour nager (St Jean de la Croix).

3)-Je vous dis, en outre, d’aimer votre anéantissement. Cela consiste à rester humbles, sereins, doux, confiants dans les périodes de ténèbres et d’impuissance; cela consiste à ne pas vous inquiéter ni vous angoisser ni même vous troubler, mais à embrasser vos croix et vos ténèbres de bon cœur – je ne dis pas avec allégresse, mais résolument et en montrant de la constance (Padre Pio).

4)-Plus nous usons des sacrements de Pénitence et d’Eucharistie, plus le joug du Seigneur est doux et aimable. Purifiée par ces sacrements, notre âme s’élève à Dieu d’elle-même (St curé d’Ars).

5)-Les épines suent le baume et la croix transpire la douceur, mais il faut presser les épines dans ses mains et serrer la croix sur son cœur pour qu’elles distillent le suc qu’elles contiennent (St curé d’Ars).
6)-Quand on peut souffrir et aimer, on peut beaucoup, on peut le plus qu’on puisse en ce monde (Bx Charles de Foucauld).

7)-Si une seule fois tu étais parfaitement entré dans l’intimité de Jésus, si tu avais savouré un peu seulement de son brûlant amour, alors tu ne tiendrais aucun compte de ce qui est pour toi-même heureux ou malheureux, mais tu te réjouirais bien davantage des humiliations, parce que l’amour de Jésus donne à l’homme la force de se mépriser (Imitation de Jésus Christ).

 4-JÉSUS ET LA CROIX

1)-Jésus n’est pas venu nous apporter une théorie de la souffrance, mais, la prenant sur Lui, il est venu la remplir de sa présence (Paul Claudel).
2)-La vraie grandeur du christianisme est d’avoir surmonté la souffrance par l’amour, car Jésus a révélé qu’il existe un amour qui peut endurer la souffrance et qui préfère aimer et souffrir que de ne pas souffrir et de ne pas aimer (Louis Evely).
3)-Le christianisme ne donne pas un remède surnaturel à la souffrance, il lui donne un sens surnaturel (Simone Weil).

4)-Si le Christ n’avait pas souffert de souffrance humaine, n’était pas mort de mort d’homme, toutes les paroles qui auraient pu venir d’en haut – si divines soient-elles -, toutes les bonnes raisons que Dieu auraient pu donner à l’homme de souffrir sans révolte n’auraient pas été assez puissantes pour que l’homme acceptât de les écouter (Christian Chabnis).
5)-Ne nous créons pas nos souffrances mais quand elles se présentent, comme Jésus, comme Marie, portons-les vaillamment. La souffrance prend la valeur que lui donne celui qui la porte. De grâce ne souffrons pas pour rien, c’est trop triste… Je connais maintenant la Joie la plus pure, la plus douce qu’on puisse connaître : celle de vivre pour les autres et pour leur bonheur. C’est en pensant aux souffrances de Jésus-Christ, à son amour rayonnant sur la croix, que je suis parvenue à m’unir à Lui dans une communion intime et constante (Marthe Robin).

6)-S’Il nous éprouve en se cachant ainsi à notre âme, c’est parce qu’Il sait que maintenant nous l’aimons trop pour le laisser (Ste Élisabeth de la Trinité).

 5-L’ESPÉRANCE AU COEUR DE LA SOUFFRANCE

1)-Vous tous qui ressentez plus lourdement le poids de la croix
2), vous qui pleurez
3), vous les inconnus de la douleur, reprenez courage : vous êtes les préférés du royaume de Dieu, le royaume de l’espérance, du bonheur, et de la vie; vous êtes les frères du Christ souffrant, et avec lui, si vous le voulez, vous sauvez le monde (Pape Benoît XVI).

4)Fais confiance au Seigneur et persévère dans ta besogne, car il est facile aux yeux du Seigneur d’enrichir soudain le pauvre d’un seul coup (Ben Sirac, 11, 12-28).
5)-Ne dis pas à Dieu : « J’ai de grands problèmes ! » Dis à tes problèmes : « J’ai un grand Dieu ! » (Auteur inconnu).
 6)-Quand on gagne, on perd souvent en humilité. Quand on perd, on gagne toujours en maturité (auteur inconnu).

6-LA JOIE AU COEUR DE LA SOUFFRANCE

1)-La joie vient de la découverte du sens de la souffrance (St Jean-Paul II).
 2)-Le ver de la souffrance doit se métamorphoser en papillon de joie (Cardinal Daneels).
3)-Il y a deux manières de souffrir : souffrir en aimant et souffrir sans aimer. Les saints souffraient tout en patience, joie et persévérance, parce qu’ils aimaient. Nous souffrons, nous, avec colère, dépit et lassitude, parce que nous n’aimons pas (St curé d’Ars).

4)- Celui qui souffre avec impatience perd le ciel, celui qui souffre avec patience gagne le ciel, mais celui qui souffre avec joie est assuré du ciel (St curé d’Ars).
5)-Ta misère, elle regarde le Seigneur. Les autres, ils attendent ta joie (St François d’Assise).
6)-Si nous étions capables de souffrir, nous serions encore plus capables d’être heureux (Janine Carette).
7)-Souffrir, c’est se taire (Vicka, de Medjugorje).

Le regard de Dieu

Un regard essentiel à acquérir, est celui du Seigneur. Bien sûr, il ne s'agit pas de vivre dans l'illusion que nous pourrions réellement voir comme Dieu voit. Mais certaines petites comparaisons peuvent être essentielles pour poser un regard plus juste et plus aimant sur nos vies.

Pour comprendre certains aspects du regard que Dieu pose sur nous, il nous suffit d'envisager le regard d'un père aimant sur son enfant. Que sait le père sur son enfant? Qu'il est faillible, et que c'est normal: qui trouve ridicule de voir un jeune enfant tomber quand il apprend à marcher? Rien que de très normal en somme. Ainsi en est-il de tout un chacun au long de sa vie spirituelle: nous apprenons à suivre les pas du Christ et nous sommes balbutiants. Nous tombons. Nous avons honte de témoigner, nous ne savons pas bien aimer nos frères ou le Seigneur... eh bien, oui: nous sommes des enfants. Nous sommes tombés, nous tombons et nous tomberons. Nous savons que le Seigneur nous relèvera toujours et qu'Il veille.

Ce même regard, nous pouvons le poser sur ceux que nous approchons: nous rappeler qu'ils sont des enfants aimés de Dieu, qu'ils cheminent, tout comme nous, et qu'ils tombent, également. Peut-être pas aux mêmes endroits que nous, voilà tout. Mais nous n'avons pas tous les mêmes aptitudes.

Ce changement de point de vue peut nous aider à faire disparaître certaines de nos duretés de cœur, envers nous comme envers les autres. Car la croissance dans la vie spirituelle passe par cette transformation de notre regard en un regard miséricordieux, aimant, simple, joyeux, attentif, intelligent, patient.

Lorsque nous péchons plus gravement, que nous suivons plus ou moins volontairement un chemin qui nous écarte loin du Seigneur, à nouveau, la comparaison est évidente - elle est même présente explicitement dans l'évangile: le Seigneur se réjouit de nous voir revenir vers lui et guette notre retour anxieusement, comme ferait n'importe quel père aimant brouillé avec son fils. Il ne faut pas s'arrêter à nos inquiétudes, à nos hontes: elles sont le fruit du péché en nous. Car «la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant» (st Irénée de Lyon). Quel père digne de ce nom s'arrêterait au retour de son fils qu'il croyait mort? Auriez-vous cette dureté? Quand bien même nous l'aurions, Dieu, lui, ne l'aurait pas («Si mon père et ma mère m'abandonnent, Yahvé m'accueillera.» Ps 27,10 «Une femme oublie-t-elle son petit enfant, est-elle sans pitié pour le fils de ses entrailles? Même si les femmes oubliaient, moi, je ne t'oublierais pas.» Is 49,15).

Enfin, l'on sait que nous ne sommes pas tous libres de la même liberté. Certains d'entre nous souffrent d'une liberté amoindrie, handicapés qu'ils sont par la vie -- ayant été victimes de traitements durs, souffrant de handicaps ou de maladies diverses -- et certains souffrent même d'une inclinaison à de terribles désordres. Ceux-là sont parfois victimes d'une hostilité généralisée, à cause de crimes qu'ils ont pu commettre ou, plus couramment, à cause de leur bizarrerie. Sur eux également, il faut apprendre à poser le regard du père aimant sur son enfant blessé. Et au plan spirituel, nous souffrons tous du handicap terrible qu'est le péché et lorsque l'un de nous s'y adonne, nous devrions bien plus le plaindre, prier pour lui, que le condamner. Car lorsque Dieu nous voit pécher, il nous offre son salut. Lorsqu'un enfant quitte le droit chemin, son père est là pour l'aider dès qu'il voudra y revenir et n'est certainement pas dans la redoutable attitude qui consiste à réduire la personne à ses actes. «Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ; remettez, et il vous sera remis.» Lc 6, 37 (on lira avantageusement ce beau texte de Taizé). En passant, on note que "ne jugez pas" ne possède pas de complément d'objet, détail grammatical essentiel pour notre vie: nous ne devons juger ni les autres, ni nous-même... ni Dieu.

Espoir et espérance

Tant que nous vivons d'espoir(s), c'est-à-dire d'objectifs humains non garantis, nous ne sommes pas au Christ et nous ne savons pas aimer. Nous sommes en réalité donnés à ce qui fait nos espoirs bien plus qu'au Seigneur, puisque c'est à ces espoirs que se trouvent suspendus notre vie, notre bonheur, notre joie, notre paix.

L'espérance que donne le Christ, elle, est déjà acquise et ne saurait être déçue. Mais elle est inaccessible à l'homme psychique ou à l'homme charnel, selon les termes de l'Écriture. Par sa mort et sa résurrection, il nous sauve de la mort éternelle et nous ouvre un chemin de vie dès ici bas, qui en passera par la souffrance et peut-être le désespoir (en raison du vieil homme qui ne veut pas mourir en nous, en raison de notre manque de foi) la tristesse (en raison de notre amour des autres - après tout, le Christ a pleuré son ami Lazare à sa mort)... la croix, en tout cas. Mais alors nous savons que la vie humaine est faite pour l'amour, que cet amour se déploiera en chaque personne de manière originale par le don de soi et la communion aux souffrances «en se faisant tout à tous». Nous savons que le plein déploiement de notre être se fera en Dieu, lorsque nous entrerons dans la vraie patrie de tous les hommes, où il sèchera toute larme.

À l'inverse, nous abandonner à nos espoirs, aussi naturels et légitimes soient-ils, montre notre peu de foi et - au fond - que nous sommes centrés sur certains de nos mouvements intérieurs, quelque incontrôlables qu'ils soient. C'est, en dernière analyse, un égoïsme parfois très subtil dont nous ne pouvons nous libérer que par la grâce du Seigneur, car il faut que meure en nous l'homme ancien pour que naisse l'homme nouveau, pour que nous vivons de la vie même du Christ.

Il n'y a pas à avoir honte de nos égoïsmes, de nos manques de foi, d'espérance: il y a à demander l'aide du Seigneur et à les combattre lorsque nous les débusquons en nous, dans nos pensées, nos réflexes, nos comportements, nos choix, nos inclinaisons.

L'espérance nous montre que quoi que nous vivions, le Seigneur peut le transformer en vie et en amour, pourvu que nous le vivions en restant aussi unis que possible à Lui. Il n'y a pas de nuit trop noire pour l'espérance, en revanche, les espoirs sont une brume légère qui s'évaporent très vite et nous laissent secs et sans souffle. En un certain sens, l'espoir est une parole du diable, l'espérance, l'appel de Dieu. En un certain sens seulement, bien sûr...

L'indifférence ignatienne comme chemin de liberté

Je reproduis ici un texte tiré de

Qui traite des «Principe et fondement»  des exercices spirituels de saint Ignace :

«L'homme est créé pour louer,
respecter et servir Dieu notre Seigneur
et par là sauver son âme,
et les autres choses sur la face de la terre
sont créées pour l'homme,
et pour l'aider dans la poursuite de la fin
pour laquelle il est créé.

«D'où il suit que l'homme doit user de ces choses
dans la mesure où elles l'aident pour sa fin
et qu'il doit s'en dégager
dans la mesure où elles sont, pour lui, un obstacle à cette fin.

«Pour cela il est nécessaire de nous rendre indifférents
à toutes les choses créées,
en tout ce qui est laissé à la liberté de notre libre-arbitre
et qui ne lui est pas défendu ;
de telle manière que nous ne voulions pas, pour notre part, davantage la santé que la maladie, la richesse que la pauvreté, l'honneur que le déshonneur, une vie longue qu'une vie courte et ainsi de suite pour tout le reste,
mais que nous désirions et choisissions uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés.»

L’indifférence ignatienne comme chemin de liberté
En prélude aux élections du nouveau Conseil général, notre animateur spiritual, Francis Barnes, nous a rappelé l’importance de l’indifférence qui est “une attitude difficile, mais absolument nécessaire pour libérer l’Esprit au sein du groupe.” J’ai essayé de comprendre pour moi-même cette attitude de ‘se rendre indifférent’. Le texte du Principe et Fondement affirme la liberté de l’homme en face de Dieu et invite à ‘l’indifférence’ qui nous fait découvrir notre vraie liberté car elle part de la liberté elle-même, en tout ce qui lui est permis, pour prescrire de ne rien vouloir.
La liberté est conduite dans un état d’indifférence pour permettre la rencontre avec l’autre liberté, la liberté divine sur laquelle elle repose. Ignace veut que “notre liberté en vienne à ‘se trouver’ dans un état d’indifférence ou, suivant la comparaison qu’il emploiera plus tard, en un parfait équilibre ‘comme l’aiguille de la balance’ et soit ainsi sensible au moindre mouvement de la liberté divine, posant en elle, à l’instant de l’élection, la détermination décisive”. (Gaston Fessard, La dialectique des Exercices Spirituels, T2, p. 29)
Il y a dans ce texte fondateur du Principe et Fondement un non dit qui est l’affirmation du principe de la liberté. La liberté de l’homme qui n’est ni abstraite, ni notionnelle, mais qui se réalise dans la pratique et dans la rencontre d’une liberté première : “L’homme ne peut pas faire que Dieu ne soit pas Dieu ; mais il peut se réaliser lui-même comme homme libre en désirant et en réalisant ce qu’il est : une relation à Dieu, un être appelé à être l’initiative divine”. (Ibid., p, 34) C’est la rencontre de deux libertés. Pour que cette rencontre soit possible, Ignace invite le retraitant à se rendre indifférent aux choses créées.
Le but de Principe et Fondement est donc de mouvoir le cœur à aimer et servir en toute chose Dieu, notre Seigneur. Ignace cherche à dégager les conditions de possibilité d’un acte libre. C’est ainsi que, dans un raisonnement logique, il pose comme condition nécessaire de l’acte libre l’indifférence. L’exigence n’est pas simplement une exigence de la raison, mais aussi une exigence pratique. Beaucoup de gens se bloquent sur l’expression ‘se rendre indifférent’ et surtout sur les quatre couples de contraires. L’énumération de ces binômes montre que la liberté de l’homme n’est pas absolue. Il y a des choses qui dépassent le libre vouloir de l’homme. C’est le cas du premier et du dernier couple, santé - maladie, vie courte - vie longue, qui ne dépendent pas vraiment de la liberté de l’homme. La première fois que j’ai rencontré le texte du Principe et Fondement, j’ai été très attiré par la cohérence du texte, mais j’étais incapable de l’accepter au niveau affectif.
‘Se rendre indifférent’ n’est pas à comprendre dans le sens où l’on utilise le mot indifférence aujourd’hui. Il se vit dans notre relation à Dieu, car c’est cette relation qui donne une coloration à toutes nos autres relations. C’est une attitude qui interpelle l’homme d’aujourd’hui dans ses certitudes et dans sa volonté de tout décider et de tout faire sans aucune référence à Dieu.
L’attitude de ‘se rendre indifférent’ rappelle à l’homme que c’est dans la vie de tous les jours, dans nos relations concrètes aux personnes, aux choses et aux évènements que se vit notre relation à Dieu. C’est pourquoi, selon Jean Claude Guy, “Ignace pose, comme préalable aux Exercices, la reconnaissance qu’il n’y a pas pour l’homme d’authentique recherche de Dieu qui ne passe par une insertion dans le monde créé, et, réciproquement, il n’y a pas de parfait engendrement dans le monde créé qui ne soit le fruit d’une ouverture à Dieu”. Les choses ne sont pas de simples jouets, ni de simples instruments dans les mains de l’homme, mais le lieu de la rencontre avec Dieu, car ce n’est pas dans l’imaginaire que Dieu nous attend, mais dans le réel, c’est-à-dire dans les choses, les situations, les évènements. C’est conduit par l’Esprit du Christ qui est en nous que nous allons à leur rencontre.
‘L’indifférence’ ignatienne se vit de deux façons. La première se vit dans le cadre d’un choix, d’une élection. Principe et Fondement aide le retraitant à entrer dans une attitude d’indifférence ignatienne, c’est-à-dire dans une attitude d’ouverture et de disponibilité. Il se détache de ses inclinations pour tel ou tel choix ainsi que de ses répugnances, pour pouvoir choisir librement dans le sens de ce que Dieu désire pour lui en ce moment précis. Se rendre indifférent est la seule condition pour que nos choix ne soient pas détournés de la fin pour laquelle nous sommes créés. Quand on prend, par exemple, le choix d’un état de vie. Dans l’un comme dans l’autre, on vit pleinement la fin pour laquelle on est créé. ‘Se rendre indifférent’ signifie non pas choisir a priori un état de vie et se cramponner dessus, mais plutôt rester ouvert au désir de Dieu : “C’est dans un cœur désencombré que nous percevons par où doit nous mener notre désir de Dieu et dans quelle mesure il se servira de ces biens créés, fussent-ils opposés entre eux.”
‘L’indifférence’ se vit aussi tout au long de la vie comme une attitude chrétienne fondamentale et c’est la deuxième façon de la vivre. C’est se comporter de telle sorte qu’en toute chose, on puisse trouver Dieu. Dans notre relation à Dieu, on ne fait pas de différence entre les choses. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre le “nous ne voulions pas, pour notre part, davantage santé que maladie, richesse que pauvreté, honneur que déshonneur, vie longue que courte et ainsi de suite pour tout le reste. Nous désirons et choisissons seulement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés”. Dans chacune de ces situations, habité par l’esprit du Christ, je loue Dieu et je reconnais sa présence créatrice. Nous avons là un écho des paroles de saint Paul aux Romains : “Nous savons que pour ceux qui aiment Dieu, ceux qu’il a choisis et appelés, Dieu se sert de tout pour leur bien […]. Je sais que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les forces du monde, ni le présent, ni le futur, ni les puissances du ciel, ni l’enfer ou quelque autre créature ne peut nous priver de cet amour de Dieu dans le Christ Jésus notre Seigneur”. (Rm 8, 28, 38-39)
L’attitude fondamentale du chrétien est donc cette conviction que, dans la maladie ou la santé, dans la richesse ou la pauvreté, il est toujours uni au Christ dans la louange. Ce qui ne veut pas dire que dans la maladie ou dans la pauvreté, on vit une sorte de résignation. La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant. L'important est de se rappeler que toute situation peut nous éloigner de Dieu comme elle peut nous conduire à lui. En toute chose, il est essentiel de chercher ce qui nous conduit à la fin pour laquelle nous sommes créés : “L’indifférence est donc un double mouvement d’engagement dans des moyens pour parvenir à une fin qui est le service de Dieu, en même temps que le dégagement de ces moyens pour que la fin cherchée puisse être atteinte”.
L’indifférence n’est pas un désintérêt des choses de la vie, mais plutôt une ouverture, une disponibilité et une générosité pour accueillir l’Autre dans sa vie.
L’indifférence vécue dans le quotidien comme une attitude chrétienne fondamentale nous rappelle qu’elle ne peut pas être saisie uniquement comme un préalable à la liberté. On ne finit jamais de se rendre indifférent.
Didier Sawadogo
Tiré du Petit Echo N° 1015 2010/9

Combat spirituel

La vie spirituelle est le lieu d'un combat entre la vie et la mort, selon ce que le Seigneur nous dit: «J'ai mis devant toi la vie et la mort, choisis la vie afin que tu vives !» Dt 30, 19.
Mais faire le choix de la vie n'est pas simple, car les sources de mort peuvent être attirantes et les lieux de vie, fort peu séduisants à première vue.

La vie humaine ne se déploie que dans un mouvement: l'amour, l'amour de Dieu en nous, et elle est contrariée avant tout par le péché, spécialement notre orgueil et notre égoïsme. L'un et l'autre se combattent, donc, avec des moyens dont tout un chacun peut s'emparer si vraiment l'on veut choisir la vie, en un chemin où moyen et fin se confondent et ne doivent pour autant pas être pris l'un pour l'autre.

Le premier moyen est le but: l'adoration et la louange de Dieu, tout particulièrement dans l'eucharistie, où nous nous exposons avant tout à la source de la vie, de tout bien et de tout amour, nous laissant progressivement purifier de notre péché pour grandir dans la sainteté, pour vivre de la vie même de Dieu. Dans ce lieu, nous sommes toute passivité, oubli de nous même, rendant à Dieu ce qui lui appartient et manifestant notre amour pour Lui.

Un autre moyen essentiel est à nouveau un but: le service des autres et de prier pour eux - à vrai dire, quel autre moyen d'aimer... que d'aimer? Et l'on ne peut aimer Dieu sans aimer son frère (1Jn 4, 20). Notre amour de nos frères et sœurs doit procéder de notre amour de Dieu, et donc de notre foi et de notre espérance: notre foi qui nous enseigne que tout homme a été sauvé par le Christ, notre espérance qui appelle tout un chacun à vivre dans l'amour de Dieu pour l'éternité.

Dans la prière d'action de grâce pour le bien que nous recevons et dans l'union à Dieu lorsque la croix passe dans notre vie, grande ou petite, lieu d'expression et de croissance dans l'amour totale, celui que le Christ nous a montré.

En demandant au Seigneur la force de grandir pour mieux aimer et servir, pour nous purifier de nos replis sur nous-mêmes, de nos superficialités qui nous font mal comprendre les autres ou douter de Dieu lui-même. En apprenant donc à nous regarder en vérité, sans nous juger, mais en sachant voir nos mouvements de repli, d'oubli du Seigneur et des autres. Un moyen tout simple peut être de regarder ces défauts des autres qui nous exaspèrent et essayer d'en repérer les germes en nous, plutôt que d'en faire une occasion de condamnation de notre prochain.

En vivant nos échecs spirituels dans la miséricorde infinie de Dieu et dans l'espérance: de tout, le Seigneur peut tirer un bien plus grand encore et nos fautes peuvent nous faire grandir dans l'humilité, l'abandon au Seigneur, la compréhension de nos frères. Il ne nous appartient que de ne pas baisser les bras. Et le sacrement si essentiel de la réconciliation, source de force intérieure, de joie de paix et d'amour du Seigneur.

En nous nourrissant dans la prière d'oraison et de demande.

En cultivant les vertus, pour former notre volonté. Les vertus auxquelles il faut s'entraîner, sans considérer pour autant que nous sommes la source de la vie, mais que par notre consentement libre à lutter contre la mort et à faire grandir la vie dans les petits détails du quotidien ou de plus graves composantes de notre existence, nous puissions laisser le Seigneur faire son œuvre en nous. Et donc sans juger nos résultats - ils ne nous appartiennent pas - mais en restant simplement dans l'effort, confiants que tout ce qui est vécu par Lui, avec Lui et en Lui portera du fruit. Il en va ici comme du sport: les premiers efforts sont les plus difficiles lorsque le vrai entrainement commence et l'on ne peut grandir sans claire vision du but: aimer Dieu, les autres et nous même. En gardant bien présent à l'esprit que nos chutes sont des occasions de progrès immense si nous nous rapprochons du Seigneur.
Il est important de comprendre que désespérer de nos chutes montre que nous vivons dans un orgueil mortifère, égocentrisme subtil qui nous pousse à croire que nous sommes la source de notre sainteté, de nos progrès. Mais Dieu seul est Saint et c'est Lui qui nous donne la sainteté, que nous pouvons accueillir ou refuser. Nous, nous devons chercher à nous unir à la volonté de Dieu jusqu'au plus intime de nous-même, de nos désirs, apprendre à nous réjouir de sa présence, comme on se réjouit de la présence de l'être aimé, indépendamment de nos supposées imperfections.
Car voir nos imperfections et s'en attrister, c'est les tenir pour plus importantes que Dieu Lui-même, plus importantes que sa présence aimante et vivifiante. En revanche, il faut savoir reconnaître dans ces mouvements intérieurs l'occasion d'une prise de conscience de zones de notre être à purifier, zones progressivement mises à jour au fil de notre vie et des expériences que nous traversons, zones à convertir à l'amour de Dieu, des autres et de nous-même. Il n'y a pas à se désoler de telle ou telle rétractation, il faut la remettre au Seigneur et la combattre quand elle se représente.
Pour cet entraînement, il faut un plan de vie auquel nous tenir pour ne pas perdre le chemin, un plan fait de choses simples, claires et vérifiables qui multiplie quotidiennement les rencontres avec celui que nous cherchons à aimer toujours plus et -- pourquoi pas ? -- un coach, c'est-à-dire un père spirituel...

En nous formant spirituellement. Il s'agit de profiter de l'expérience de ceux qui nous précèdent dans la foi, il s'agit de nourrir notre intelligence et nous encourager sur le chemin. Nourrir l'intelligence de notre foi afin de mieux connaître le Seigneur, les autres et nous même, pour mieux aimer -- car peut-on aimer ce que l'on ne connaît pas? Être encouragé sur le chemin par celui que d'autres ont suivi, où nous les voyons lutter, tomber, se relever, s'interroger... tout comme nous.

Comprendre, enfin, que l'amour est un mouvement unique. Aimer Dieu, ses frères et soi-même procède de l'amour de Dieu en nous. S'il est un seul des trois que nous n'aimons pas, l'amour n'est pas en nous. Et ce n'est pas une catastrophe, c'est une réalité toute humaine qui appelle de notre part ouverture à l'action sanctifiante du Seigneur pour apprendre à voir le monde comme Il le voit, l'aimer comme Il l'aime, jusqu'à notre petite personne.Le christianisme n'est pas introspection solitaire, il est dialogue intérieur. Si, lorsque nous nous regardons nous le faisons sans le Seigneur, nous sommes dans l'égocentrisme et l'orgueil. Nous sommes en grand danger de ne pas nous aimer et d'oublier l'appel du Seigneur à la vie, qui ne veut qu'une chose: que nous vivions dans l' union d'amour avec Lui. Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu...

dimanche 19 février 2017

Une étude sur Macron aurait-elle fuité ?

Vous trouverez ici une version courte en anglais et là la version originale et plus longue en français d'une étude scientifique sur le phénomène Macron, apparemment avant le processus de relecture par les paires qui est d'usage dans le milieu scientifique : on ne peut donc pas garantir la pleine véracité de toutes ces informations... chacun pourra se faire son avis.