mercredi 27 juillet 2016

Cette guerre est d'abord spirituelle

Le père Jacques est mort. C'est-à-dire qu'il est entré dans la lumière du Seigneur. Cette tragédie, selon le mot consacré désormais par un usage trop fréquent, a un revers : la pleine communion avec Dieu, communion d'amour éternelle, pour ce prêtre qui est resté fidèle jusqu'au bout, ayant versé son sang par fidélité au Christ. Bien sûr, nous pleurons sa mort, mais que nos coeurs meurtris sachent également se laisser toucher par la Vérité qui a habité toute cette existence : "celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera." Et à présent, le père Jacques est dans la joie du repos éternel, où il nous attend, auprès de son Dieu, et certainement pose-t-il sur nous le regard de bonté et de confiance de celui qui voit toute chose de la vision de Dieu. Il n'y a de tragédie que dans la mesure de notre doute. Notre foi, elle, nous assure cette vérité toute simple : nous reverrons le père Jacques quand nous franchirons le rideau de la mort.

Pour ses assassins, il est plus difficile de deviner la suite de l'histoire. Peut-être le père Jacques a-t-il offert sa vie, comme saint Étienne, en priant pour ses bourreaux ? Peut-être le martyr a-t-il pu contribuer au salut de ceux qui venaient le tuer ? Nous ne pouvons que l'espérer et prier pour Adel et son complice, afin qu'ils échappent à la damnation éternelle. 

Quelle morale pouvons-nous tirer de ce qui vient de se produire ? Nous avons dédaigné l'annonce de l'évangile et voilà que nous laissons des gamins nés en France prendre le chemin de la damnation - ce qu'à Dieu ne plaise ! Quelle a été la vie de ces deux assassins ? L'auteur de ces lignes n'en sait rien. Mais ont-ils croisé des témoins du Christ, porteurs du message de l'évangile ? On peut en douter, lorsque l'on voit la timidité de l'évangélisation dans notre pays. Et pourquoi évangélisons-nous aussi peu ? Car nous ne croyons pas. Nous ne croyons pas que le Christ est mort et ressuscité pour sauver les hommes de leur péché. Car nous n'espérons pas. Nous n'osons même pas imaginer que notre témoignage pourrait toucher les coeurs et bouleverser des vies, pour un plus grand amour, pour une naissance nouvelle en Dieu. Nous n'aimons pas. Nous n'aimons pas ceux que nous croisons et que nous trouvons trop différents. Nous ne souhaitons pas leur bien, le seul vrai bien : que leur vie soit saisie par le Christ et qu'ils en viennent à vivre une vie pleinement humaine, c'est-à-dire plongée dans le pardon et l'amour de Dieu.
Notre espoir, notre foi, notre charité ont été dissouts. Nous payons notre matérialisme et, tous, nous avons notre part de responsabilité, lorsque nous avons trahi le message du Christ pour aller vers des solutions humaines, de droite, de gauche, du centre... car s'il y a ceux à qui il appartient de prendre les décisions publiques adaptées à la situation, pour protéger le peuple français, il y a avant tout chacun de nous, qui devons laisser le Christ extirper le mal de nos coeurs, témoigner auprès de ceux qui sont proches, prier sans cesse. Mais notre témoignage ne peut être calcul. Il ne peut être que rayonnement, rayonnement d'un coeur qui se laisse toucher par Dieu et ne veut qu'aimer. Un coeur qui sait voir dans la brute la plus cruelle un enfant bien aimé de Dieu dont le coeur a été tellement corrompu qu'il en est devenu méconnaissable et paraît un enfant du démon. Ce qu'il ne peut être, car le démon est sans descendance: il n'a que des esclaves, des soumis. Il nous faut un coeur brisé, qui laisse le Seigneur conduire notre vie, un coeur qui ne s'efforce que de rester fidèle dans l'aridité, le désespoir et la souffrance, par amour de son Seigneur bafoué, conscient la souveraineté sans partage du Seigneur, car : vous avez appris qu'il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d'extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait.

Ne perdons pas l'espérance : nous ne sommes que pèlerins en ce monde et nous nous retrouverons tous dans l'amour de Dieu, si nous Le laissons gouverner nos vies.
Ne perdons pas la foi : le Seigneur, maître de tout, dirige l'histoire et sait tirer du mal un bien plus grand encore, par-delà ce que voient nos yeux et devinent nos intelligences - restons confiants, enfant du Royaume, mais non pas de ce monde.
Ne perdons pas l'amour, l'amour de nos frères et tout particulièrement de nos ennemis et de ceux qui commettent de tels atrocités et devront comparaître devant la justice divine.

Rendons grâce, pour la vie du père Jacques, martyr de France. Demandons au Seigneur de nous donner de rester unis à Lui comme son prêtre a su le rester, jusqu'au bout, quelles que soient les circonstances.

Et que faire, aujourd'hui ? Prions et offrons. Nous pouvons aller à la Messe, (r)ouvrir nos bibles et prendre le temps de l'oraison. Nous pouvons (re)découvrir le chapelet. Nous pouvons offrir de notre argent à ceux qui sont dans le besoin. Nous pouvons accorder du temps aux autres, selon les circonstances et selon ce qui habite nos coeurs, nos corps et nos intelligences. Soyons d'abord à notre tâche, à l'écoute du Seigneur.
Combattons en nous ce qui fait obstacle à la lumière divine : notre peur, d'abord, notre péché, ensuite. En gardant bien à l'esprit que ce sont aussi nos alliés, puisque, les combattants par nos efforts nous nous ouvrons à la grâce de l'amour de Dieu, nous sortons de notre égoïsme, de notre orgueil. Et alors, nous pouvons offrir notre peur d'aller à la Messe. Notre incapacité à y aller. Nous pouvons demander au Seigneur de nous pardonner, de nous donner sa vie, et de nous envoyer en mission, vers tous ceux que nous verrons, qu'Il aime et qu'Il doit nous apprendre à aimer, envers et contre tout. Car nous avons déjà gagné : Christ est vraiment ressuscité !